mercredi 14 janvier 2015

Les croyances, en hypnose, c'est important !

Une des premières choses qu'on fait, au début, quand on apprend l'hypnose, c'est d'apprendre à démystifier. Retirer les fausses croyances. On construit son pré-talk, on pratique un petit peu, et avec toute l'assurance du monde, on lance avec force un « On ne peut pas forcer les gens à faire des choses qu'ils ne veulent pas ! », et gare à celui qui viendrait faire un rapprochement entre hypnose et manipulation ! J'imagine que chaque débutant passe par cette étape un jour où l'autre, et après tout, c'est normal.

Et puis un jour, une personne nous pose LA question. Si, si, vous savez, celle qui est particulièrement gênante, qui détruit votre modèle et qui va à l'encontre de votre compréhension. On en a tous une qui traîne quelque part et qu'on aime pas entendre. Pour moi, cette question, ça a longtemps été « Mais si tu dis qu'on est toujours au contrôle de ce qu'il se passe, pourquoi est-ce que ton volontaire ne peut plus détacher sa main ? C'est pas de la perte de contrôle, ça ? ».



Et là, Aïe. Ca pique un peu. Difficile de simplement répondre que c'est juste de l'imaginaire, alors que le volontaire en question met toutes ses forces à lutter contre lui-même et que, visiblement, il semble éprouver une réelle difficulté à bouger sa main. Non non, l'imaginaire, il a bon dos, tout comme l'inconscient qui « accepte (ou refuse) la suggestion » selon la réussite (ou l'échec) du phénomène hypnotique. Il y a quelque chose d'autre qui se passe.

« Ouais, mais dans les spectacles, les gens ils font n'importe quoi ! Comment tu peux savoir qu'ils veulent faire ce qu'on leur dit ?! Ils ne feraient jamais ce qu'ils font en temps normal ! »

Ouch, encore une. C'est vrai qu'on a souvent vu des gens raconter qu'ils se sentaient « obligés » de suivre les suggestions. Y'a même certaines personnes qui finissent limite en état de choc émotionnel après être passé sur scène lors de certains spectacles. Si vraiment ils n'avaient pas voulu suivre les suggestions, pourquoi ne les ont-ils pas tout simplement bloquées ? Est-ce que leur inconscient a accepté la suggestion alors que leur conscient ne le voulait pas ? Quelle est cette étrange magie qui fait planer sur l'hypnose le spectre de la manipulation, du mystère et du doute ?

Alors petit à petit, on commence à chercher. On regarde les modèles, on compare les explications, on cherche une vérité là où les gens se contredisent.

« L'hypnose est une manipulation, mais une manipulation du sujet sur l'hypnotiseur ! En hypnothérapie par exemple, c'est le sujet qui manipule l'hypnotiseur pour en tirer un bénéfice : l'hypnotiseur devient l'outil du sujet ! » dit grosso merdo Antoine Garnier.
« Toute communication est manipulation, et on ne peut pas ne pas communiquer » déclare Pank de Hyp-n-ose.
« On ne peut pas forcer une personne à faire ce qu'elle ne veut pas ! », clame Street-Hypnose !

Alors quoi ? Qu'est-ce qu'il se passe dans la tête des gens à ce moment là ? Est-ce qu'on ne pourrait pas trouver une phrase, un axiome, une base sur laquelle expliquer ces paradoxes ? La vérité doit exister quelque part, d'où vient cette variabilité ?

  

Réfléchir l'hypnose autrement


J'ai trouvé mes premiers éléments de réponse dans Brain Software, le podcast de Mike Mandel. C'est assez connu sur le forum, c'est un hypnotiseur que j'aime bien. J'aime son modèle, j'aime sa pratique et j'aime bien le bonhomme, aussi. Avant de vous donner simplement l'axiome que j'utilise aujourd'hui, je vous invite à prendre un petit peu plus de distance vis-à-vis du modèle d'hypnose que vous utilisez. Qu'est-ce qui, dans votre pratique, fait que vous obtenez les résultats que vous obtenez et pas autre chose ?

Je relie immédiatement cette question à l'excellent article de Raphael de Street-Hypnose sur l'importance du cadre (que je vous invite fortement à lire si vous ne l'avez pas encore fait), mais j'aimerai prendre encore plus de recul, aller plus loin. Qu'est-ce qui fait qu'un cadre limite et influence les réactions des personnes sous hypnose ? Que pose le cadre, réellement ?

Un cadre pose des limites. Il pose des limites par le lieu, l'environnement (pas de thérapie en rue, par exemple), et il pose des limites par suggestion. Certains l'appelleront démystification, d'autres fusibles, d'autres encore pré-talk, mais qu'importe son nom : ce qui est important, c'est que ces suggestions limitent les expériences. Elles encadrent. Elles adaptent les croyances du volontaire pour créer le cadre qui va conditionner l'expérience hypnotique (de rue, de thérapie, de spectacle).

Au regard de cette prise de distance, quel est l'axiome qui permet d'expliquer les différentes réactions obtenues en hypnose lorsque l'on change le cadre ? Un petit retour à Mike Mandel...

 « Hypnosis is context driven »


L'hypnose est dirigée par son contexte. Première pierre dans mon avancée. Le cadre, le contexte et ses suggestions influencent les réponses aux phénomènes hypnotiques. Qu'est-ce qui change quand on change de contexte ? On change d'hypnotiseur, on change de sujet, mais plus important encore, on change les croyances liées au cadre. Et on change les croyances à tous les niveaux : pour l'hypno et pour le volontaire/sujet/client.

Prenez deux exemples contraires : la thérapie et le spectacle.
Je reprends la thérapeute de l'article de Raphael : dans ses croyances, faire une amnésie, c'est difficile. Du coup, ça devient difficile pour elle de faire une amnésie !
De même, pour le volontaire en spectacle qui croit qu'il est sous l'influence de l'hypnotiseur, et qu'il doit faire tout ce qu'il dit, sa croyance devient réalité !

Adaptez vos croyances ! C'est l'un de leurs effets : en les changeant vous modifiez votre perception du réel, vous altérez votre réalité afin de voir ce que vous voulez voir, et c'est un mécanisme inconscient.

L'axiome que j'utilise donc aujourd'hui est le suivant : On va en hypnose avec ses croyances. Elles conditionnent l'expérience hypnotique, et la plus grande partie des croyances vis-à-vis de l'hypnose sont établies durant le grand recadrage qu'est le pré-talk.

Je ne vous demande pas d'accepter cet axiome comme une vérité, bien au contraire. Mais c'est quelque chose qui a tellement augmenté ma compréhension que je le partage avec vous. Gardez bien en tête que je ne suis aucunement détenteur de vérité : ce qui compte, c'est que vous vous forgiez votre modèle d'hypnose, votre compréhension. Allez voir ce qui se fait ailleurs ! Diversifiez vos apprentissages et variez les modèles. Testez.

Petit à petit, on se forge sa propre vision de l'hypnose, et on comprend les choses différemment. Quelles sont les croyances fondatrices de votre pratique ? Et quand vous allez les remettre en cause une à une, de quelle manière votre pratique va-t-elle devenir infiniment meilleure ?

Posez vous ces questions, réellement, et constatez vous-même les changements qui vont s'en suivre. Alors, aujourd'hui, vous en êtes où dans vos croyances ?

4 commentaires:

  1. Pfiou, flemme de tout lire (rajoute des dessins !). J'ai parcouru en diagonale et c'est effectivement intéressant sur les questions que je me posais, et qui me rendent réticente à l'hypnose, merci.

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    1. Haaa ! J'aurai dû mettre plus de dessins, c'est vrai ! :0
      En fait ce billet a été publié autre part juste avant que je ne le poste ici, et je n'avais droit qu'à un seul dessin, donc du coup, bah y'en a qu'un... :0

      Merci du commentaire, Youille ! :3

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  2. Moi j'ai beaucoup aimé, c'est plutot bien ecrit, et ça amène à réfléchir, merci :)

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